SAINT-NAZAIRE à la Belle Epoque (de 1880 à 1914)...-25
AU FEU LES POMPIERS !...
Petit retour en arrière : c'est par un décret du 18 septembre 1811 que Napoléon 1er instaure le bataillon des sapeurs-pompiers de Paris au statut militaire. Mais, dès février 1815, une circulaire affirme le caractère civil de ce corps, même si l'organisation en est bien militaire...
Puis, un décret du 29 septembre 1875 officialise la création des corps communaux civils de sapeurs-pompiers et les organise : la lutte contre les incendies est leur mission principale, ils sont rattachés au Ministère de l'Intérieur, portent l'uniforme, les communes participent aux dépenses.
Dès lors, répartis sur le territoire national, les différents corps arborent pendant des années, uniforme et drapeau différents.
A Saint-Nazaire, comme ailleurs en France, le drapeau des sapeurs-pompiers devient l'un des symboles les plus importants du corps et s'impose de haute lutte auprès de celui de l'armée. Voyez cet article du Courrier de Saint-Nazaire datant, pourtant, du 20 août 1898 !
A la Belle Epoque, par une loi de 1884, la responsabilité des communes est réaffirmée. Le "service des pompes" doit bien être l'objet de dépenses locales.
La presse régionale s'en fait l'écho. Le budget municipal de 1893 prévoit, par exemple, une ligne budgétaire spéciale :
( La Démocratie de l'Ouest - 14 décembre 1892)
Autre exemple : le maire de Saint-Nazaire, M. A. Lechat, décide de prendre en charge les frais d'une sortie des sapeurs-pompiers pour l'incendie d'une ferme à Escoublac, que le maire d'Escoublac refuse de payer. On lit dans le compte-rendu de la séance extraordinaire du Conseil municipal du mardi 27 septembre 1898, retranscrit par le Courrier de Saint-Nazaire en date du 1er octobre 1898 :
Le Conseil municipal vote aussi régulièrement une allocation spéciale pour la participation des sapeurs-pompiers de Saint-Nazaire à un concours de pompes à incendie.
(L'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire - 15 mai 1887)
La presse locale en témoigne : les sapeurs-pompiers sont bien à la charge des communes. Toutefois, une loi de finances de 1898 prévoit une subvention de l'Etat aux communes pour l'organisation générale de la lutte contre les incendies.
Le Ministère de l'Intérieur intervient aussi en supprimant, par exemple, la taxe sur les vélocipèdes pour les pompiers :
(Le Courrier de Saint-Nazaire - 14 octobre 1899)
En effet, rapidement, les sapeurs-pompiers sont reconnus dans leur spécificité tant par l'Etat que par les communes.
A la Belle Epoque où la protection sociale était quasi inexistante (absence de retraite, de congés payés, etc), les sapeurs-pompiers, dès 1899, pouvaient bénéficier d'une pension lorsqu'ils tombaient malades ou étaient blessés en service (Article 12 du décret du 12/07/1899).
Voyez ce rappel dans le Courrier de Saint-Nazaire du 9 juin 1900 :
Et dès 1887, un autre journal rend compte de l'état du fonds de retraite des sapeurs-pompiers de Saint-Nazaire.
(L'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire - 17 avril 1887) :
Nul ne songe d'ailleurs à leur contester ces prérogatives. Hier comme aujourd'hui, les sapeurs-pompiers sont en effet populaires !
A la Belle Epoque, ils sont d'autant plus populaires à Saint-Nazaire qu'ils participent activement à tous les grands évènements de la ville, en dehors de leur mission de lutte contre les incendies.
En 1886, le Courrier de Saint-Nazaire du 3 avril nous apprend que les sapeurs-pompiers encadrent la venue exceptionnelle de Ferdinand de Lesseps :
Ils participent, tous les ans, aux festivités du 14 juillet :
(L'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire - 10 juillet 1892)
Et aussi en 1900 dans le Courrier de Saint-Nazaire du 14 juillet :
Le succès de leur parade n'est pas démenti par cet article du Courrier de Saint-Nazaire en date du 15 juillet 1899 :
Les sapeurs-pompiers sont de toutes les festivités, comme lors des fêtes de Saint-Nazaire du 7 au 9 août 1886. Ils organisent leur propre concours de pompes à incendie.
On apprend par le chroniqueur que la tenue des sapeurs-pompiers n'est pas encore unifiée en 1886. L'uniforme ne s'imposera que bien progressivement après le décret de 1875...
(L'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire - 15 août 1886)
Emporté par son enthousiasme devant le spectacle offert par les sapeurs-pompiers, le chroniqueur poursuit en espérant des avancées sociales pour tous les sapeurs-pompiers ! Voyez la suite du même article :
Ces concours sont importants car la presse présente, à chaque fois, la liste des futurs participants. Dans l'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire du 1er août 1888, par exemple :
Ces "concours de pompes" deviennent, au fil des ans, traditionnels et attirent un public important.
Le Courrier de Saint-Nazaire en parle dans ses colonnes et donne même, après leur déroulement, la liste des prix obtenus par les sapeurs-pompiers de la région dans son édition du 4 août 1899 :
Regroupés dans l'Union départementale des sapeurs-pompiers de la Loire-Inférieure, fondée en 1898, les sapeurs-pompiers tiennent dès lors un banquet annuel. L'occasion de rappeler encore que ces concours sont avant tout courtois.
(Le Courrier de Saint-Nazaire - 20 août 1898)
Les sapeurs-pompiers font partie intégrante de la vie des nazairiens. Hormis ces concours, la presse régionale annonce régulièrement aussi les sorties pour des exercices de pompes à incendie, de sauvetage, notamment sur la place Marceau. Là encore, les habitants s'y rendent en nombre.
(Le Courrier de Saint-Nazaire - 02 septembre 1899)
Ou encore dans le numéro du 25 août 1900 :
Ces démonstrations publiques sont souvent suivies d'un banquet en présence de M. le Maire..Le Courrier de Saint-Nazaire du 20 août 1898 relate avec humour le menu des festivités :
Mais leur présence au sein de la communauté ne s'arrête pas là. Dès le 19e siècle, les sapeurs-pompiers font aussi oeuvre de bienfaisance au niveau national.
Le 16 janvier 1887, l'Avenir de l'arrondissement de Saint-Nazaire nous apprend que les sapeurs-pompiers ont collecté avec succès des fonds, pour des sinistrés à l'autre bout de la France :
Participation à la vie de la commune, aux principales festivités dont celles du 14 juillet, compétitions sportives, promotion des musiques des sapeurs-pompiers, autant d'activités qui relèveront un peu plus tard des Amicales de Sapeurs-Pompiers.
Ainsi, en 1912, le Phare de la Loire rappelle qu'une grande soirée artistique est organisée par l'Amicale créée quelque temps auparavant :
Somme toute, on le comprend à la lecture de la presse : à la Belle Epoque, les sapeurs-pompiers préfigurent ceux d'aujourd'hui dans leur organisation et leur mission de sauvetage, mais aussi dans leur mission de solidarité avec les populations et bientôt, à travers les Amicales, d'entraide entre les pompiers eux-mêmes ! Certes, de notables évolutions et améliorations suivront au 20e siècle.
Pour en citer quelques unes :
- En 1925, l'association de plusieurs communes pour entretenir un corps est autorisée par l'Etat
- En 1932, attribution du fameux "18"
- En 1955, création des Services Départementaux d'Incendie et de Secours (SDIS)
- En 1976, les femmes peuvent devenir pompiers... etc. etc.
Mais une chose est certaine : à la Belle Epoque comme au 21e siècle, la devise des pompiers est bien "Courage et dévouement" !!
Paru en septembre et disponible à la vente sur le site !
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